Sociétés

LPA
lpa | 14 novembre 2024 | 227 vues

Sud-Kivu : multiplicité d’ONG à Uvira et Fizi et son impact sur le développement local

La prolifération d’organisations non gouvernementales (ONG) soulève des interrogations croissantes sur l’efficacité de leurs interventions et leur véritable impact sur les populations locales dans les territoires d’Uvira et de Fizi.

Alors que les autorités locales semblent bénir cette multiplication, les résultats sur le terrain laissent à désirer, posant un sérieux questionnement sur le développement des communautés qui devraient en être les principales bénéficiaires.

Un écosystème ONG en pleine expansion

La partie sud du Sud-Kivu avec Uvira, Fizi et Mwenga attire de nombreuses ONG nationales et internationales, attirées par les défis socio-économiques et sécuritaires de la région. Face aux crises d’humidité, aux conflits armés et à la pauvreté généralisée, les ONG s’affichent comme des sauveurs potentiels et proposent des projets variés : santé, éducation, infrastructure, lutte contre la pauvreté, la cohésion sociale, etc.

Malgré cette bonne volonté apparente, la multiplicité des initiatives pose des problèmes de redondance et de mauvaise allocation des ressources, car nombreuses ne fonctionnent pas avec leur fond propre. En effet, certaines ONG s’attaquent à des problématiques similaires sans coordination, ce qui entraîne un gaspillage de ressources financières et humaines, laissant les besoins réels des populations souvent inassouvis.

Une Bénédiction des autorités contestée

Les autorités locales, dans un élan de soutien, semblent approuver cette multitude de projets et d’initiatives. Cependant, cette approbation est de plus en plus critiquée par des acteurs de la société civile qui pointent du doigt une déconnexion entre les priorités des ONG et celles des habitants.

« Les autorités doivent s’assurer que chaque projet réponde aux besoins réels des populations », lâche un observateur, qui a préféré garder son anonymat. « Au lieu de cela, nous voyons souvent des initiatives qui semblent conçues sans consultation adéquate des communautés. »

Certaines organisations, selon l’analyste Shukuru Shemitalo, existent parce qu’elles ont eu le F92 que l’État congolais donnait pour leur permettre de fonctionner, mais sans avoir une connaissance sur les missions, les objectifs et la vision de plusieurs d’entre ces ONG. D’où son appréciation quant à la refondation observée au niveau du ministère de la justice et du garde des sceaux qui, « aujourd’hui, on est en train de réviser ce document et on demande la personnalité juridique qui est un document autre que F1D ».

Des populations en quête de réponse

Les bénéficiaires potentiels, quant à eux, font entendre leur mécontentement et les récits d’initiatives échouées se multiplient. « Nous avons vu des projets qui durent seulement quelques mois avant de disparaître, laissant derrière eux des infrastructures mal conçues et inutilisées », se plaint un leader communautaire. « Nous avons besoin d’aide continue, pas de solutions temporaires. »

Pendant ce temps, les promesses d’assistance humanitaire se sont souvent heurtées à des réalités de terrain où les besoins fondamentaux restent insatisfaits et les ressources destinées à ces projets s’évaporent dans des coûts administratifs élevés, souvent peu justifiés sur le papier que sur le terrain, et vient se poser aussi le problème du détournement.

« Vous trouverez une structure qui a été financée une seule fois et ça disparaît. Un autre défi, c’est quand il y a de l’argent, la somme est bouffée. D’autres ne font que réaliser le 20 % du projet et 80 % dans les poches. Voilà un peu le défi que l’État congolais doit essayer de mettre fin, car nombreuses d’entre ces ONG ne font que répondre aux besoins de leurs structures », souligne Shukuru Shemitalo Leonard, analyste indépendant.

Vers une nouvelle approche

L’importance d’une approche plus intégrée et collaborative est cruciale. « Les structures doivent travailler en synergie. Et quand on parle en synergie, ces organisations doivent collaborer, doivent travailler de commun accord avec la population pour identifier les vrais besoins ressentis de la population », fait savoir M. Shukuru.

La multiplicité d’ONG dans les territoires d’Uvira et Fizi, bien qu’apparemment bénéfique sur le papier, révèle des dysfonctionnements importants qui nuisent aux populations qu’elles prétendent aider.

À une époque où les solutions durables sont plus nécessaires que jamais, il devient crucial de repenser l’approche adoptée par ces entités. Seule une collaboration véritable et inscrite dans les réalités locales pourra transformer ces initiatives en véritables leviers de développement pour les communautés d’Uvira et Fizi.

 

Pascal BAHUNDE – LPA Sud-Kivu  



0 Commentaire :



Laissez votre commentaire