Sud-Kivu : multiplicité d’ONG à Uvira et Fizi et son impact sur le développement local
La prolifération d’organisations non gouvernementales (ONG) soulève des interrogations croissantes sur l’efficacité de leurs interventions et leur véritable impact sur les populations locales dans les territoires d’Uvira et de Fizi.
Alors que les autorités locales semblent bénir cette multiplication, les résultats sur le terrain laissent à désirer, posant un sérieux questionnement sur le développement des communautés qui devraient en être les principales bénéficiaires.
Un
écosystème ONG en pleine expansion
La partie sud du Sud-Kivu avec Uvira,
Fizi et Mwenga attire de nombreuses ONG nationales et internationales, attirées
par les défis socio-économiques et sécuritaires de la région. Face aux crises
d’humidité, aux conflits armés et à la pauvreté généralisée, les ONG
s’affichent comme des sauveurs potentiels et proposent des projets variés :
santé, éducation, infrastructure, lutte contre la pauvreté, la cohésion
sociale, etc.
Malgré cette bonne volonté apparente,
la multiplicité des initiatives pose des problèmes de redondance et de mauvaise
allocation des ressources, car nombreuses ne fonctionnent pas avec leur fond
propre. En effet, certaines ONG s’attaquent à des problématiques similaires
sans coordination, ce qui entraîne un gaspillage de ressources financières et
humaines, laissant les besoins réels des populations souvent inassouvis.
Une
Bénédiction des autorités contestée
Les autorités locales, dans un élan de
soutien, semblent approuver cette multitude de projets et d’initiatives.
Cependant, cette approbation est de plus en plus critiquée par des acteurs de
la société civile qui pointent du doigt une déconnexion entre les priorités des
ONG et celles des habitants.
« Les
autorités doivent s’assurer que chaque projet réponde aux besoins réels des
populations », lâche un observateur, qui a préféré garder son anonymat. « Au lieu de cela, nous voyons souvent des
initiatives qui semblent conçues sans consultation adéquate des communautés.
»
Certaines organisations, selon
l’analyste Shukuru Shemitalo, existent parce qu’elles ont eu le F92 que l’État
congolais donnait pour leur permettre de fonctionner, mais sans avoir une
connaissance sur les missions, les objectifs et la vision de plusieurs d’entre
ces ONG. D’où son appréciation quant à la refondation observée au niveau du
ministère de la justice et du garde des sceaux qui, « aujourd’hui, on est en train de réviser ce document et on demande la
personnalité juridique qui est un document autre que F1D ».
Des
populations en quête de réponse
Les bénéficiaires potentiels, quant à
eux, font entendre leur mécontentement et les récits d’initiatives échouées se
multiplient. « Nous avons vu des projets
qui durent seulement quelques mois avant de disparaître, laissant derrière eux
des infrastructures mal conçues et inutilisées », se plaint un leader
communautaire. « Nous avons besoin d’aide
continue, pas de solutions temporaires. »
Pendant ce temps, les promesses
d’assistance humanitaire se sont souvent heurtées à des réalités de terrain où
les besoins fondamentaux restent insatisfaits et les ressources destinées à ces
projets s’évaporent dans des coûts administratifs élevés, souvent peu justifiés
sur le papier que sur le terrain, et vient se poser aussi le problème du
détournement.
« Vous
trouverez une structure qui a été financée une seule fois et ça disparaît. Un
autre défi, c’est quand il y a de l’argent, la somme est bouffée. D’autres ne
font que réaliser le 20 % du projet et 80 % dans les poches. Voilà un peu le
défi que l’État congolais doit essayer de mettre fin, car nombreuses d’entre
ces ONG ne font que répondre aux besoins de leurs structures », souligne
Shukuru Shemitalo Leonard, analyste indépendant.
Vers
une nouvelle approche
L’importance d’une approche plus
intégrée et collaborative est cruciale. « Les
structures doivent travailler en synergie. Et quand on parle en synergie, ces
organisations doivent collaborer, doivent travailler de commun accord avec la
population pour identifier les vrais besoins ressentis de la population »,
fait savoir M. Shukuru.
La multiplicité d’ONG dans les territoires d’Uvira et Fizi, bien qu’apparemment bénéfique sur le papier, révèle des dysfonctionnements importants qui nuisent aux populations qu’elles prétendent aider.
À une époque où les solutions durables sont plus nécessaires
que jamais, il devient crucial de repenser l’approche adoptée par ces entités.
Seule une collaboration véritable et inscrite dans les réalités locales pourra
transformer ces initiatives en véritables leviers de développement pour les
communautés d’Uvira et Fizi.
Pascal BAHUNDE – LPA Sud-Kivu
0 Commentaire :
Laissez votre commentaire