Sociétés

LPA
lpa | 01 octocbre 2025 | 353 vues

Prison centrale Mulunge à Uvira : entre conditions inhumaines et urgence judiciaire

L’Observatoire Droits, Justice et Gouvernance Locale pour la Cohésion sociale en RDC (ODJGL/SC) alerte sur des conditions de détention « inhumaines » à la prison centrale de Mulunge à Uvira, siège provisoire des institutions de la province du Sud-Kivu. Me Ghislain Barhahiga, directeur de l’Observatoire, dit dans une entrevue à La Presse africaine avoir constaté l’absence d’eau, le manque de nourriture, de soins et d’une prise en charge judiciaire conforme.

« Il n'y a pas d’eau, pas de couvertures, pas de lits, pas de médicaments. L'hôpital existe mais il n'est pas équipé », dénonce Me Ghislain. Selon lui, des droits fondamentaux sont bafoués, les détenus manquent de l’essentiel : alimentation, vêtements, matelas et soins médicaux. Notre source souligne à cet effet que la majorité des personnes incarcérées sont des membres des forces armées FARDC et des Wazalendo, c’est‑à‑dire des agents de l’État. « L’État devrait mettre des conditions qui permettent à ces agents d’éviter des maladies et de recevoir des soins appropriés », insiste-t-il.

Détention irrégulière et défaillance de la justice

 Au-delà des lacunes matérielles, l’ODJGL/SC dénonce de graves manquements procéduraux. La loi prévoit que le magistrat ayant ordonné la détention mette en œuvre les diligences nécessaires et saisisse la chambre du conseil pour régulariser la situation des détenus, dans un délai imparti. À Uvira, cette procédure n’est pas respectée : des personnes restent emprisonnées depuis des semaines sans que leur situation soit examinée par la chambre du conseil, fait savoir le directeur de l’ODJGL/SC, Me Ghislain Barhahiga.

« Ce sont des personnes qui restent dans des conditions de détention irrégulières », a-t-il affirmé, tout en dénonçant une « négligence » des magistrats et des parquets. Pire, il accuse certains magistrats d’être eux‑mêmes « premiers violeurs » des lois qu’ils sont censés appliquer, en renvoyant les prévenus « comme des colis » à la prison sans suivi judiciaire.

Faible présence du chef de parquet, impunité possible

L’Observatoire pointe également le manque de supervision hiérarchique : le chef de parquet, selon Me Barhahiga, vit au Burundi et ne suit pas régulièrement les dossiers locaux. Ce vide de supervision laisserait « une route ouverte aux violations des droits des prisonniers ».

Appel à l’action immédiate

Face à l’urgence, l’Observatoire appelle à la prise en charge humanitaire immédiate (eau potable, vivres, matelas, couvertures) ;

  • rééquipement et renforcement du personnel de l’hôpital pénitentiaire en médicaments et matériel médical ;
  • régularisation systématique et immédiate des détentions afin de respecter les procédures judiciaires et le droit à un procès équitable ;
  • mise en responsabilité disciplinaire, voire pénale, des magistrats qui ne respectent pas la loi procédurale ;
  • intervention des organisations humanitaires pour une assistance d’urgence.

« Il faut ramener tout le monde à l'ordre », conclut Me Barhahiga. « Ces personnes sont des pères de famille, des grands‑pères ; elles ont droit au respect de leurs droits fondamentaux. »

En attendant une intervention étatique ou humanitaire, la population carcérale de Mulunge demeure exposée à des risques sanitaires et juridiques majeurs une situation que l’ODJGL/SC qualifie d’« urgence humanitaire et judiciaire ».

 

Pascal BAHUNDE – LPA Sud-Kivu



0 Commentaire :



Laissez votre commentaire